Le cadre canadien actuel (Effets en double, partie 3)
30 mars 2015
Dans la partie 1 de notre série, nous avons vu l'importance de comprendre et de gérer le risque d'effets de paiement en double (les doubles) au Canada dans le monde de l'imagerie des chèques, et expliqué comment l'ACP a amorcé un dialogue sur la question dans l'industrie. Dans la partie 2, nous avons partagé les leçons apprises des Américains depuis leur transition à l'imagerie. Ces leçons peuvent aider l'ACP et ses institutions membres à surveiller et à gérer efficacement le risque d'effets en double tout en tirant le meilleur parti des avantages de l'imagerie pour les Canadiens.
Un grand souci pour les États-Unis est d'améliorer la prévention et la détection des doubles, vu que l'irritant que représente la correction des problèmes d'effets en double est considérable pour les institutions financières et leurs clients. Dans cet article, nous examinons les possibilités de prévenir et de détecter les doubles au Canada pendant le parcours du paiement. Nous examinons également les éléments de recours qu'offre le cadre juridique canadien actuel. Considérant l'expérience américaine, ce cadre continuera-t-il de bien servir les Canadiens?
Possibilités de prévenir et de détecter les doubles
À la banque du client déposant
Il est possible de prévenir les doubles à la banque du client déposant par une surveillance efficace des doubles dans les divers circuits. Cela comprend les dépôts faits au guichet automatique, en personne ou par des solutions de télésaisie des dépôts (TSD) comme les applis qui permettent de déposer des chèques en les photographiant avec un téléphone intelligent. La connaissance de son client peut aussi aider à faire en sorte que seuls les effets de paiements légitimes passent par la compensation.
Aux centres de traitement des paiements
Les centres de traitement des paiements qui desservent les institutions financières (IF) canadiennes sont idéalement placées pour prévenir et détecter les doubles pendant les processus hautement automatisés de tri et d'échange des paiements.
À l'IF du client payeur
Il incombe aux IF de protéger l'accès aux comptes de dépôt de leurs clients. Après la compensation, les chèques sont présentés à l'IF du client payeur pour qu'elle puisse décider de les honorer ou pas. Cela s'appelle la décision de « payer ou ne pas payer ». L'IF du client payeur a la possibilité de détecter les doubles à ce moment là ainsi que pendant le report au compte.
Les clients peuvent aussi aider en utilisant des chèques portant des numéros de série qui ne se répètent pas trop souvent, car cela peut aider à détecter les paiements en double tirés sur leurs comptes. Les clients peuvent aussi suivre de près eux-mêmes leur compte, et signaler les doubles à leur IF.
Le cadre juridique actuel
Selon les Règles de l'ACP1, un paiement en double est un effet autorisé qui a été payé plus d'une fois. Cela peut se produire dans les cas où :
- un original et une image, un imprimé d'image ou une photocopie ont été payés;
- un effet original a été payé plus d'une fois; ou
- une image, un imprimé d'image ou une photocopie a été payé plus d'une fois.
L'IF de l'émetteur du chèque a 90 jours civils pour rejeter et retourner le double à l'IF du déposant par la compensation. Cela respecte les échéanciers de retour pour d'autres problèmes causés par une erreur interne de l'IF, comme lorsqu'un chèque est accidentellement compensé dans la mauvaise devise. Mais cela restera t il approprié dans l'environnement d'imagerie?
Loi sur les lettres de change et détenteur régulier
La Loi sur les lettres de change (LLC) renferme certaines dispositions qui concernent le « détenteur régulier » et dont l'objet est de protéger les droits des personnes qui acceptent des chèques en paiement. Mais la LLC remonte à bien des années avant que les comptoirs d'encaissement des chèques ne se répandent et que les services de TSD n'arrivent sur le marché. Aujourd'hui, les dispositions relatives au détenteur régulier exposent l'émetteur du chèque à un risque important si son chèque tombe dans les mains d'une personne malhonnête.
Par exemple, supposons que vous reteniez les services d'un fraudeur qui se présente comme entrepreneur pour remplacer le couvre-sol de votre cuisine. Il doit acheter les matériaux avant de faire le travail, et vous réclame un chèque de 1000 $ pour les payer. Puis il disparaît avec votre chèque et vous ne le revoyez plus. Vous appelez donc votre banque pour faire bloquer le paiement. Le fraudeur encaisse son chèque dans un comptoir d'encaissement, qui ne soupçonne pas le moindre problème avec le paiement. Il endosse le chèque, et le remet à l'encaisseur, qui devient le détenteur régulier. Le comptoir d'encaissement remet les fonds au fraudeur (moins les frais exigés pour son service d'encaissement) et dépose le chèque à sa banque pour se le faire payer par la vôtre. Lorsque votre banque retourne le chèque à l'autre banque pour la raison « arrêt de paiement », le comptoir d'encaissement peut vous forcer à lui rembourser les fonds, selon la Loi sur les lettres de change.
Dans le monde de l'imagerie des chèques, le risque associé aux dispositions relatives au détenteur régulier devient encore plus prononcé. Un fraudeur pourrait déposer des images de chèques par TSD auprès de nombreuses IF avant d'aller encaisser le chèque papier au comptoir d'encaissement des chèques. Comment les dispositions relatives au détenteur régulier s'appliqueront-elles alors?
Dans notre prochain article, nous examinerons plus en détail les principales considérations de politique et verrons quels éléments du cadre canadien il pourrait être nécessaire de changer dans l'environnement d'imagerie.
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1 Règle A4 de l'ACP - Effets retournés et réacheminés retour à la référence