Perspectives

Se réunir pour discuter de la prochaine génération de données et d’information relatives aux paiements et aux règlements des opérations sur titres

Chaque année, je me réjouis de rencontrer des chercheurs, des universitaires et des responsables des politiques pour échanger sur l’avenir des paiements.

Cette année, les 27 et 28 juillet, Paiements Canada, en partenariat avec la Banque du Canada et la Deutsche Bundesbank, a tenu un atelier sur les données et les informations relatives aux paiements et aux règlements des opérations sur titres. Cet atelier annuel réunit des experts nationaux et internationaux du secteur s’intéressant aux systèmes de paiement. L’objectif est de faire le point sur les dernières recherches en la matière, de stimuler les discussions sur la prochaine génération de systèmes de paiement, de partager ses connaissances et d’apprendre de l’expérience de chacun.

Cet atelier d’une journée et demie portait sur divers domaines liés aux données et aux informations sur les paiements et le règlement des opérations sur titres : 

  • l’utilisation des données sur les opérations de paiement pour prévoir certains indicateurs macroéconomiques importants;
  • les facteurs économiques qui sous-tendent l’évolution des technologies financières et le rôle qu’elles jouent dans l’écosystème des paiements et des règlements de titres;
  • les développements en cours dans la sphère des monnaies numériques.

Les séances relatives aux services bancaires ouverts m’ont particulièrement marqué. Malgré les nombreux avantages des services bancaires ouverts, ces discussions ont montré qu’il reste un certain nombre de défis majeurs à relever en matière de recherche et de politique. Deux questions clés ont été soulevées.

La première question était la suivante : Quels sont les moteurs de l’adoption des services bancaires ouverts?

Les analyses fondées sur des données et des modèles présentées au cours des séances révèlent que, contrairement aux idées reçues, la concurrence (ou son absence) dans le secteur bancaire n’est pas déterminante dans l’adoption des services bancaires ouverts. Le facteur le plus important est la confiance envers les technologies financières. Dans d’autres pays, les lois sur les services bancaires ouverts ont permis d’accroître la confiance et les investissements en capital-risque dans les technologies financières. En outre, les services bancaires ouverts ont favorisé l’octroi de prêts aux petites et moyennes entreprises. Ces deux points soulignent l’importance potentielle des fournisseurs de prêts entre pairs.

Du côté des consommateurs, les discussions ont permis de cerner certains effets potentiellement défavorables des services bancaires ouverts en fonction du type de service envisagé (c’est-à-dire les services bancaires ouverts fondés sur les conseils et les services bancaires ouverts fondés sur le crédit). Les « services bancaires ouverts fondés sur le conseil » désignent l’utilisation des données financières ou bancaires des clients par des tiers dans le but exprès de fournir des services de planification financière. On trouve dans ce segment des entreprises comme First Wealth et Open Advice. Les « services bancaires ouverts fondés sur le crédit » désignent quant à eux l’utilisation de données financières par des tiers dans le but principal d’accorder des prêts et du crédit aux clients; il s’agit notamment de systèmes de paiements fractionnés (« acheter maintenant, payer plus tard ») et de services de prêt personnel ou entre pairs comme ceux fournis par Finio Loans et Koyo.

La recherche économique présentée indique notamment que les services bancaires ouverts fondés sur les conseils sont plus répandus, et que les services bancaires ouverts fondés sur le crédit entraînent une augmentation du partage des données et exposent ceux qui refusent de partager leurs données à des coûts plus élevés. En d’autres termes, les personnes qui choisissent de ne pas communiquer leurs renseignements personnels ne bénéficient pas de taux et de conditions d’emprunt avantageux. Le contraste avec les personnes qui choisissent de partager leurs informations personnelles est évident. Les personnes qui dévoilent des renseignements généraux à leur sujet, susceptibles d’intéresser les prêteurs, peuvent se voir proposer des taux d’emprunt plus intéressants.

Voici maintenant la deuxième question : Y a-t-il des avantages au partage de données dans le cadre d’ententes de services bancaires ouverts fondés sur le crédit?

Les services bancaires ouverts donnent lieu à un compromis entre la protection des renseignements personnels des clients et les avantages liés au partage des données. Si les emprunteurs présentant un degré de solvabilité plus faible sont mieux disposés à partager leurs données, toutes les catégories d’emprunteurs, qu’ils présentent un degré de solvabilité élevé ou faible, y trouvent leur compte. En effet, les données permettent aux entreprises de technologie financière de mieux adapter leurs conditions de prêt sur la base de l’historique des transactions d’un client.

Tout particulièrement, les données relatives aux paiements permettent d’évaluer la vulnérabilité de l’emprunteur aux fluctuations des prix. Autrement dit, les emprunteurs accepteront plus volontiers de partager leurs données si cela leur permet d’obtenir un résultat favorable, à savoir de meilleurs taux d’emprunt. Cela dit, l’expérience sur les marchés de l’assurance suggère que le partage des données peut être préjudiciable à certaines catégories de personnes en fonction des critères ethniques et autres facteurs sociodémographiques. Le partage des données peut néanmoins favoriser l’inclusion financière des nouveaux immigrants qui présentent une faible probabilité de défaut de paiement, mais qui n’ont pas les antécédents de crédit exigés par les prêteurs traditionnels.

L’intervention de Tarush Gupta, analyste quantitatif associé chez Paiements Canada, sur l’impact des chocs macroéconomiques sur la valeur et le volume des paiements, a également retenu mon attention. Notre équipe Économie d’entreprise continue d’élaborer des produits de données et des modèles quantitatifs pour fournir des renseignements précieux à nos membres et à nos partenaires commerciaux internes. Ce travail nous permet de cerner les risques découlant d’événements économiques extrêmes, comme la crise liée à la COVID-19 et une stagnation économique plus générale.

Les banques centrales suisse et mexicaine nous ont également fait part de nombreux conseils sur la façon dont Paiements Canada peut poursuivre l’amélioration de ses prévisions avancées de l’activité économique canadienne. Les données relatives aux paiements sont un enregistrement de chaque transaction effectuée dans l’économie. Nous cherchons activement des moyens d’exploiter les données relatives aux paiements pour prévoir des indicateurs comme le PIB et les taux d’inflation du Canada trois mois plus tôt que les sources traditionnelles de mesure économique. Pour en savoir plus sur ces recherches, consultez nos documents de travail

Je ne saurais trop insister sur l’importance de se réunir pour débattre de l’avenir des paiements avec les pairs de l’industrie. C’est grâce à ces échanges d’idées perspicaces, stimulants et collaboratifs que nous façonnons la prochaine génération de paiements. Je compte déjà les jours qui nous séparent de l’atelier de l’année prochaine à Francfort, en Allemagne. En attendant, je vous invite à poursuivre ces discussions capitales lors du SOMMET 2024 de Paiements Canada, qui se tiendra à Toronto du 29 au 31 mai 2024.

 

Headshot Segun Bewaji

Segun Bewaji
Conseiller économique principal
Paiements Canada

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